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Le plan secret de l’état telecom en cas de crise

en cas de crise géopolitique permettant au système telecom de continuer à fonctionner

En partenariat avec Bisatel Telecom

Face aux menaces croissantes pesant sur les infrastructures critiques et à la multiplication des crises, la France déploie une stratégie ambitieuse pour garantir la résilience de ses communications d’urgence. Le plan secret de l’état telecom en cas de crise. Le Réseau Radio du Futur, projet majeur du ministère de l’Intérieur, s’impose comme la colonne vertébrale d’un dispositif gouvernemental longtemps resté confidentiel.

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Une infrastructure telecom vieillissante face aux défis contemporains

Depuis les années 1980, les forces de sécurité françaises s’appuient sur des réseaux radio analogiques puis numériques pour coordonner leurs interventions. L’Infrastructure Nationale Partageable des Transmissions, communément appelée INPT, constitue depuis 2006 le socle des communications des services de secours sur le territoire national. Ce réseau, basé sur la technologie TETRAPOL développée par EADS, regroupe environ 1 500 stations relais couvrant près de 95 % de la population métropolitaine.

L’INPT permet l’interopérabilité entre les différentes forces de sécurité : police nationale via le réseau ACROPOL, gendarmerie avec RUBIS, sapeurs-pompiers grâce au système ANTARES, et personnels du SAMU. Cette infrastructure, considérée comme stratégique par le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, a démontré son efficacité lors d’événements majeurs tels que le sommet du G7 à Biarritz en 2019 ou l’Euro 2016.

Cependant, cette infrastructure atteint aujourd’hui ses limites. Conçue à une époque où les communications se limitaient à la voix et aux messages textuels, l’INPT ne permet pas la transmission de données volumineuses, de vidéos en temps réel ou la géolocalisation précise des intervenants. Lors de l’incendie de Notre-Dame de Paris en 2019, la saturation des réseaux 4G commerciaux a mis en lumière la vulnérabilité des communications d’urgence lorsque les infrastructures classiques sont surchargées.

Le réseau radio du futur : un investissement de 700 millions d’euros

Initié en 2017 par le président de la République et officiellement lancé en octobre 2022, le Réseau Radio du Futur représente la réponse de l’État aux insuffisances constatées. Ce projet, inscrit dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur 2022-2027, mobilise un budget initial de 700 millions d’euros, susceptible d’atteindre 2 milliards d’euros sur l’ensemble de sa durée de vie.

Le RRF repose sur une architecture hybride innovante combinant les infrastructures des opérateurs commerciaux Orange et Bouygues Telecom avec des équipements tactiques déployables en situation de crise. Contrairement à l’ancien système, il exploite les technologies 4G et 5G, offrant un très haut débit permettant les appels vidéo, le partage de géolocalisation en direct, la transmission d’électrocardiogrammes ou encore l’envoi de fichiers volumineux depuis le terrain.

L’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours, établissement public créé en mars 2023, pilote le déploiement de ce réseau souverain. Les premiers services en exploitation ont été activés le 7 octobre 2025 avec les SAMU de Saint-Étienne et Roanne dans le département de la Loire. Le calendrier prévoit une couverture progressive : 43 départements en 2025, 30 en 2026, et les 24 derniers en 2027, pour un total de plus de 300 000 utilisateurs potentiels.

Le secteur des télécommunications connaît une mutation profonde où les acteurs traditionnels côtoient de nouveaux entrants. Dans ce contexte, l’accompagnement des projets de création d’opérateurs télécoms devient un enjeu stratégique pour répondre aux besoins spécifiques de certains secteurs d’activité, notamment ceux liés à la sécurité et aux services d’urgence.

Un dispositif de protection des infrastructures critiques

Le RRF s’inscrit dans un cadre plus large de protection des activités d’importance vitale. Le dispositif SAIV, mis en place en 2006 et piloté par le SGDSN, identifie plus de 300 opérateurs d’importance vitale répartis dans 12 secteurs stratégiques, dont les communications électroniques. Ces OIV, dont la liste demeure classifiée secret défense, exploitent environ 1 500 points d’importance vitale sur le territoire national.

La loi de programmation militaire impose à ces opérateurs des obligations renforcées en matière de cybersécurité. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information accompagne les OIV dans la mise en œuvre de 20 règles de sécurité couvrant la gouvernance, la maîtrise des risques et la protection des systèmes d’information d’importance vitale. Tout incident affectant ces systèmes doit être notifié à l’ANSSI, permettant une coordination rapide face aux cyberattaques.

Le projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques, actuellement en discussion au Parlement, transpose les directives européennes REC et NIS 2. Ce texte élargit le périmètre du dispositif SAIV à de nouveaux secteurs et impose aux opérateurs d’importance vitale l’élaboration d’un plan de résilience opérateur. Les amendes pour manquement peuvent atteindre 10 millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial.

La résilience au cœur de la doctrine nationale

Le SGDSN coordonne la planification de sécurité nationale et la préparation aux crises majeures. La circulaire du 26 septembre 2023 définit l’organisation gouvernementale pour la gestion des crises, articulée autour de la cellule interministérielle de crise placée sous l’autorité du Premier ministre. Ce dispositif, testé régulièrement lors d’exercices gouvernementaux, permet de mobiliser l’ensemble des centres opérationnels ministériels et interministériels.

La sous-direction de la protection et de la sécurité nationale anime les travaux de planification interministérielle, incluant les plans de la famille Pirate, le plan crue de la Seine, le plan national de continuité électrique et le plan Pandémies. Le bureau de veille et d’alerte, activé 24 heures sur 24, assure une surveillance permanente des questions de défense et de sécurité nationale au profit des plus hautes autorités de l’État.

L’évolution technologique des télécommunications transforme également les usages grand public. Les solutions de connectivité internationale par eSIM illustrent cette mutation vers des services plus flexibles et dématérialisés, une tendance que les réseaux gouvernementaux intègrent progressivement dans leurs architectures.

Défis et perspectives pour les communications de crise

Le déploiement du RRF soulève plusieurs questions. Le financement de l’exploitation, assuré par les abonnements des entités utilisatrices, inquiète les collectivités territoriales quant au montant de leur contribution. Un incident de 3 millions d’euros impliquant des serveurs neufs détériorés chez Capgemini en 2023 a également alimenté les interrogations sur la maîtrise industrielle du projet.

Par ailleurs, la migration progressive des services de secours de l’INPT vers le RRF nécessite des passerelles techniques avec les anciens réseaux. L’arrêté du 28 juin 2024 impose désormais aux établissements recevant du public de première catégorie de garantir la couverture radioélectrique permettant l’accès au RRF, avec des vérifications triennales par des organismes agréés.

Dans un contexte géopolitique marqué par l’intensification des cyberattaques et des menaces hybrides, la souveraineté des communications de crise constitue un enjeu stratégique majeur. La cyberattaque contre Kyivstar, principal opérateur ukrainien, en décembre 2023 a démontré les conséquences dramatiques d’une paralysie des télécommunications sur les capacités de défense d’un pays.

Le Réseau Radio du Futur s’impose ainsi comme un pilier de la stratégie nationale de résilience. En offrant aux forces de sécurité et de secours un outil de communication moderne, interopérable et hautement sécurisé, l’État français se dote des moyens nécessaires pour faire face aux crises du XXIᵉ siècle, qu’elles soient naturelles, technologiques ou malveillantes.

Sources et références :

• Ministère de l’Intérieur – Communiqué de presse RRF, octobre 2022

• ACMOSS – Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours

• SGDSN – Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale

• ANSSI – Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information

• Sénat – Rapport sur le réseau radio numérique des services de secours (ANTARES)

• Vie-publique.fr – Projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques

• ANFR – Agence nationale des fréquences

• Légifrance – Arrêté du 7 juillet 2021 relatif à la continuité des radiocommunications

• Banque des Territoires – Localtis

• L’Usine Digitale

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